La Journée Mondiale de la Santé Digestive 2020 a pour objectif d’actualiser les connaissances des professionnels de la santé et du grand public sur le microbiome intestinal, son rôle sur la santé en général et sa contribution au traitement de maladies. Quelles interventions préparez-vous ?
Cela fait maintenant 15 ans que l’Organisation Mondiale de Gastroentérologie (WGO) organise des événements autour de la Journée mondiale de la santé digestive. Le thème de cette année est « Microbiome intestinal : une perspective mondiale ». Pour ce faire, WGO a élaboré une série d’Outils et Ressources dont des webinaires, directives, articles avec des points de vue d’experts, etc. Dans une perspective internationale, ces ressources ont été développées par le comité directeur de la Journée Mondiale de la Santé Digestive, lequel est constitué de deux coprésidents et de 19 membres expert du microbiome intestinal.
Le comité directeur préparera une série de vidéos concises, ainsi qu’un manuel détaillé rédigé par ses soins et à l’aide d’autres experts internationaux ; ces contenus spécialisés en gastroentérologie, hépatologie et nutrition seront axés sur le thème de l’année 2020.
Il convient de signaler que la Journée Mondiale de la Santé Digestive est activement promue et organisée par plusieurs organisations partenaires ainsi que par nos 115 sociétés de gastroentérologie nationales qui forment ensemble l’Organisation Mondiale de Gastroentérologie. Nos sociétés membres produisent des matériaux éducatifs qui sont distribués au personnel de soins et aux patients. Elles organisent des ateliers et des séances éducatives pendant leurs réunions annuelles, développent des campagnes sur les réseaux sociaux et collaborent avec la presse locale pour diffuser des informations sur le microbiome intestinal.
Quand nous parlons de prendre soin de notre microbiote intestinal, est-il question d’alimentation et de nutrition ?
Les probiotiques et les prébiotiques administrés peuvent favoriser la santé de notre microbiote intestinal
Alors que l’alimentation et la nutrition jouent en grande partie sur la composition de notre microbiome, il existe d’autres facteurs qui y contribuent comme l’utilisation d’antibiotiques et autres médicaments ; ceux-ci peuvent en effet perturber l’équilibre entre les bonnes et mauvaises bactéries. Des recherches continuent à être menées pour savoir jusqu’où la prise de médicaments entraîne des perturbations et peut avoir des incidences sur notre santé. Toutefois, nous savons déjà que les probiotiques et prébiotiques ont des effets bénéfiques sur le microbiote intestinal. Administrés en quantités adéquates dans notre alimentation, ils peuvent favoriser la santé du microbiote.
La santé intestinale devient de plus en plus populaire auprès de nos lecteurs. Mais qu’est-ce qu’elle signifie exactement ?
Avec tant d’aliments, de boissons et de stratégies marketing axés sur l’amélioration de la santé intestinale, il n’est pas surprenant que le public soit plus sensibilisé à ce qu’il mange. La campagne pour la Journée Mondiale de la Santé Digestive a préparé quelques questions-réponses autour du microbiome intestinal à l’attention d’un public de non-initiés, le but étant de dissiper les mythes et la désinformation. Comme nous le savons, la santé intestinale est rattachée aux bactéries saines et variées présentes dans le tube digestif de l’Homme. On y trouve des trillions de bactéries issues de nombreuses espèces et souches, mais également des virus, des levures ainsi que d’autres microorganismes. La recherche sur la façon dont ces composants agissent sur notre santé en général en est encore à son premier stade. Le centre de l’Association Américaine de Gastroentérologie (AGA) pour la recherche et l’éducation sur le microbiome intestinal a également développé des outils dédiés à la santé intestinale à destination des patients.
Que devrions-nous manger pour avoir une meilleure santé intestinale ?
L’alimentation est ce qui participe le plus à la formation de notre microbiome
L’alimentation est ce qui participe le plus à la formation de notre microbiome. Son influence est tangible de l’enfance (allaitement ou biberon) jusqu’à l’âge adulte et chez les seniors. En fait, tous les composants de l’alimentation exercent une influence sur le microbiome. Pour simplifier, il faudrait une alimentation variée à base de fruits, légumes et fibres pour favoriser un microbiome diversifié et en bonne santé.
D’après vous, le grand public et certains praticiens souffrent-ils d’une désinformation au sujet du microbiome intestinal ?
Oui. La recherche a beaucoup avancé au cours des 10-15 dernières années et la communauté scientifique a désormais une meilleure compréhension de la façon dont les bactéries de l’intestin influencent la santé humaine. En sensibilisant les personnes, partout dans le monde, sur le rôle que le microbiome intestinal peut avoir dans le diagnostique, le traitement des maladies et le soulagement des symptômes, nous pouvons avoir un impact sur la santé de l’Homme et notamment, dans les pays à revenus faibles et intermédiaires.
Certains articles récents évoquent un lien entre la COVID-19 et le microbiote intestinal. Que pouvons-nous faire, dans ce cas, au niveau de la santé digestive ? Est-il possible de renforcer notre système immunitaire à travers l’alimentation ?
Nous pouvons renforcer notre système immunitaire à travers notre alimentation
Oui. Nous pouvons réellement renforcer notre système immunitaire à travers notre alimentation. Les bactéries dans l’intestin aident à réguler le système immunitaire. Avec une bonne alimentation, le microbiome intestinal se diversifie et renforce l’organisme, ce qui lui permet notamment de réguler l’inflammation, l’un des symptômes de la COVID-19.
Que pensez-vous des tests de microbiome intestinal devenus tendance ?
Les changements dans le microbiome ont été, certes, associés à plusieurs maladies. Et il semble que le microbiome puisse prédire la réponse à divers traitements. Mais nous n’en sommes pas encore à un stade où la connaissance de votre microbiome est suffisamment pertinente pour vous garder en bonne santé ou prédire les risques de maladie. Nous avons encore un long chemin à parcourir pour comprendre ce qui est vraiment normal.
Vous êtes la première femme à la présidence de la WGO. L’un des objectifs de votre présidence est d’encourager les femmes à servir les comités de WGO pour avoir plus d’impact sur la communauté internationale. Qu’allez-vous entreprendre ?
WGO est consciente du besoin de diversifier ses membres et, cela faisant, d’augmenter la participation des femmes leaders à ses comités et groupes d’intérêt. Nous travaillons actuellement au développement d’un comité de jeunes membres et à un programme de mentorat pour la recherche clinique afin d’offrir à des individus partageant des points de vue similaires des opportunités de s’engager. Ensuite, ces personnes auront à leur tour un impact sur la communauté internationale. De plus, avec le soutien de la présidente du comité des programmes scientifiques de WGO, le professeur Carolina Olana d’Uruguay, nous continuons de diversifier nos concertations scientifiques à l’occasion de nos principaux congrès mondiaux et réunions conjointes afin de compter plus de femmes expertes à des postes de présidence et de membres clés du corps professoral.
Lors de notre très récent congrès mondial à Istanbul, la séance sur « Les femmes dans la GI *», avec un panel de femmes venant de quatre régions a rencontré un franc succès. Nous invitons toutes les femmes désireuses d’avoir un impact sur la communauté internationale et un rôle actif dans WGO à visiter notre site www.worldgastroenterology.org. À travers leurs sociétés nationales, elles pourront demander à rejoindre nos comités et groupes d’intérêt. Nous ouvrirons des nominations dans le cours de l’année. Pour en savoir plus, elles peuvent également envoyer un e-mail à : info@worldgastroenterology.org.
*gastro-intestinal